Au commencement de cette enquête, j'ai vécu une expérience de dépaysement, mais celle-ci n'était pas due à un long voyage. J'ai également fait l'expérience d'un bouleversement de mes habitudes de travail en tant que musicien, mais celui-ci n'était pas initié par la découverte d'une innovation technologique. Je n'étais ni un anthropologue immergé dans un terrain exotique, ni un compositeur explorant une lutherie contemporaine.

C'est à travers AMA, une création basée sur le katajjaq, une pratique vocale traditionnelle inuit, que des questionnements ont émergé de mon expérience en tant que compositeur. En explorant cette technique vocale en tant que musicien, j'ai réalisé qu'elle possédait sa propre dynamique, et qu'à travers elle, émergeaient une culture et des savoirs. Il y avait quelque chose que les seuls concerts ne suffisaient pas à explorer, aussi bien pour moi que pour le public.

Sur un autre versant, employer une technique traditionnelle en tant qu’occidental, c’était s’exposer à ce que les dépositaires de cette pratique me reprochent de m’approprier quelque chose que je ne pouvais pas comprendre. Entre la curiosité et une certaine forme de culpabilité, il fallait trouver une voie pour avancer.

Dès lors, je me suis lancé dans la recherche de dispositifs, de démarches et de méthodes qui pourraient me permettre d’appréhender de manière respectueuse le chant de gorge et ses effets en tant que technique. C'est à ce moment que j'ai adopté une posture non seulement de création, mais aussi de recherche.